Start-up et pacte d'actionnaires

Start-up, pacte d’actionnaires et convention d’investissement : Quelle articulation ?

Le dispositif contractuel constitué d’une part, de la convention d’investissement et d’autre part, du pacte d’actionnaires permet d’organiser les rapports juridiques et financiers entre les investisseurs et l’entrepreneur lors de la création d’une start-up et au cours de son développement.

Quel est l’objet et quel champ couvre la convention d’investissement ?

Elément indissociable du pacte d’actionnaires, la convention d’investissement vise les modalités de la prise de participation des futurs actionnaires au sein de la start-up.

Cette convention prend la forme d’un protocole d’accord, signé entre les fondateurs de la société et les investisseurs qui régit les rapports entre les parties jusqu’à la réalisation effective de l’investissement.

Aux termes de ce document, les investisseurs s’engagent à souscrire un certain nombre de titres lors de la prochaine augmentation de capital.

C’est à ce stade qu’il est décidé quel type d’instrument financier sera utilisé.

La société peut ainsi émettre des actions ordinaires ou des actions de préférence.

Les actions ordinaires ou de préférence sont parfois combinées avec des bons de souscription d’actions qui pourront être exercés à des conditions préférentielles en cas de survenance de certains évènements prédéfinis.

En outre, la convention d’investissement prévoit la réalisation d’un audit ou « due diligence » par les investisseurs qui permet de compléter les informations contenues dans le business plan présenté aux investisseurs (business angels, fonds d’investissement, etc.).

Au delà des aspects financiers sur quels points spécifiques doivent porter les « due diligences » des start-up technologiques ?

Dans les sociétés issues des nouvelles technologies, l’audit sera en particulier orienté sur l’appréciation de la valeur et de la propriété des éléments incorporels tels que les technologies et le savoir-faire propre à l’entreprise.

En l’occurrence, il est fondamental de vérifier que la société cible est bien le titulaire exclusif des droits relatifs aux technologies exploitées.

En pratique, il n’est pas rare en effet de voir que ceux-ci appartiennent juridiquement aux fondateurs de la start-up.

Dans ce cas, les investisseurs subordonnent le versement des fonds au transfert des droits de propriété des technologies à la société.

Il convient, en outre, de vérifier que les technologies sont bien protégées, c’est-à-dire que toutes les formalités protectrices ont été réalisées (dépôts de marques, de brevets, de logiciels, etc.).

De plus, les contrats conclus par l’entreprise (contrats commerciaux, contrats de travail) doivent être contrôlés afin de s’assurer qu’ils contiennent des clauses de confidentialité, de protection de la propriété intellectuelle, de non concurrence du personnel, etc.

A l’issue de l’audit, les investisseurs sont censés avoir une très bonne connaissance de la société, c’est-à-dire de tous les éléments qui peuvent obérer la situation déclarée de la société, soit par la révélation d’un passif nouveau, soit par la dégradation de ses valeurs.

Les résultats de l’audit vont ainsi déterminer le contenu des garanties demandées aux fondateurs qui consistent principalement à conditionner l’investissement à la réalisation d’un certain nombre de conditions suspensives (réalisation de formalités, rédaction ou modification de contrats, des statuts de la société, etc.).

La réalisation de ces conditions rend l’engagement des investisseurs irrévocable.

Parallèlement aux « due diligences » un pacte d’actionnaires est élaboré ; quel est son rôle ? son évolution récente ?

L’évolution du capital risque et du capital investissement a été marquée ces dernières années par un développement considérable du recours au pacte d’actionnaires, document extra-statutaire et confidentiel visant à organiser les relations entre les détenteurs du capital d’une société.

Le pacte d’actionnaires présente, en effet, l’avantage d’offrir plus de possibilités dans l’organisation et le fonctionnement des sociétés.

A l’origine, ce document était destiné à organiser les relations entre actionnaires et investisseurs ; il a aujourd’hui une vocation supplémentaire qui est celle d’organiser les relations des investisseurs entre eux et de constituer une sorte de « mode d’emploi » des relations contractuelles.

Quel type de clauses trouve-t-on généralement dans un pacte d’actionnaires ?

On retrouve régulièrement deux grandes familles de dispositions contractuelles dans un pacte d’actionnaires : les clauses relatives à l’organisation et au contrôle de la gestion de la société, d’une part, et les clauses relatives à la composition et l’évolution de l’actionnariat, d’autre part.

De façon générale, on peut trouver une infinie variété de clauses qui ne peuvent être présentées de manière exhaustive ici.

Plus précisément, quelles clauses critiques rencontre-t-on au regard de la composition de l’actionnariat et de son évolution future ?

Les clauses relatives au maintien des équilibres financiers revêtent une importance considérable.

Ces clauses permettent ainsi d’assurer aux investisseurs que les variations du capital ne bouleverseront pas les équilibres à partir desquels ceux-ci ont calculé leurs risques.

Dans le cas d’une augmentation de capital social, deux difficultés sont susceptibles d’apparaître : l’investisseur peut ne pas souhaiter augmenter sa participation dans la société ; l’augmentation de capital peut avoir été réservée à un tiers, sans que l’investisseur ne puisse s’y opposer.

La clause anti-dilution permet à l’investisseur d’obtenir l’engagement des autres actionnaires, en pratique les fondateurs, de lui céder le nombre d’actions nécessaire pour maintenir son pourcentage de capital détenu antérieurement à l’opération.

Cette clause s’analyse en une promesse unilatérale de vente sous condition suspensive d’augmentation de capital.

Cette clause est souvent cumulée avec la clause de garantie de valeur, dite clause de « ratchet » qui permet de prémunir les investisseurs contre une baisse de valorisation de la société.

Concrètement, la clause de « ratchet » permet d’ajuster automatiquement à la hausse le pourcentage de détention du capital détenu, et ce, proportionnellement à la baisse de valorisation de la société.

Ainsi, en cas d’opération sur le capital intervenant à une valorisation inférieure à celle établie lors de l’entrée de l’investisseur dans la société, un système de compensation permet de ramener la valeur d’acquisition des titres de l’investisseur, à la nouvelle valeur proposée.

On trouve également des clauses d’inaliénabilité.

Pour certaines sociétés de capital-risque, la considération de la personne du ou des fondateurs peut être déterminante dans la décision d’une prise de participation.

Il est donc possible de prévoir, dans le pacte d’actionnaires, une clause selon laquelle le ou les actionnaires fondateurs s’engagent à ne pas céder tout ou partie des titres détenus ou à détenir dans la société tant que l’investisseur demeure actionnaire.

Juridiquement, cette clause est valable dans la mesure où elle est justifiée par un intérêt légitime.

Enfin, les clauses de préemption et de sortie conjointe sont couramment utilisées.

Sous l’angle juridique qu’est-ce qui différencie une start-up d’une autre société ?

Le facteur temps est primordial pour une start-up.

L’information financière et juridique doit être régulière.

Un reporting mensuel auprès des investisseurs est courant pour ce type de société.

Les entrepreneurs sont obligés d’anticiper systématiquement leurs besoins de financement et réfléchir avec plusieurs mois d’avance à l’organisation du prochain tour de table.

En conséquence, les documents juridiques, en particulier le pacte d’actionnaires, sont souvent remaniés ou refondus assez rapidement après leur établissement du fait de l’évolutivité de l’actionnariat.

Autre élément de différenciation, l’intéressement des salariés.

Les fondateurs et les managers clés bénéficient très fréquemment de stock-options, d’actions gratuites, de bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE), ou de bons de souscription autonomes (BSA).

Ces outils permettent de motiver les équipes nouvellement créées à condition que la valorisation de l’entreprise ne connaisse pas un écart trop important par rapport au business plan.

En quoi le recours à un avocat est utile dans une opération d’investissement ?

Le rôle de l’avocat consiste à trouver le bon équilibre entre les différents intérêts en présence, et à établir en conséquence l’ensemble des documents contractuels.

Son rôle est aussi de proposer des schémas d’investissement adaptés à la société concernée. Au cours de ces dernières années, on a vu en effet de nombreux dispositifs contractuels surdimensionnés par rapport à la surface financière de la société. La complexité entraîne par la suite une perte de temps et d’efficacité considérable.

L’avocat est également amené à organiser la circulation de l’information juridique entre les différents intervenants afin de permettre aux investisseurs ou aux fondateurs de réagir rapidement. Un tableau de bord de suivi juridique est souvent nécessaire.

Enfin, l’avocat participe souvent à l’évaluation des risques et à la définition d’une stratégie d’investissement.